Déclarations d'Eugène Pierre et de M. Flaissières
Déclaration d'Eugène PIERRE, Maire de Marseille au sujet de la signature de l'armistice avec l'Allemagne, suivie de la déclaration de Siméon Flaissières, séance du 11 novembre 1918
(extrait des délibérations municipales, 1 D 208, p. 85-87)
Messieurs,
L'heure de la justice immanente a sonné.
L'armistice avec l'Allemagne vient d'être signé.
Le dernier et le plus puissant de non ennemis, le vrai responsable de toutes les ruines, de toutes les misères et de tous les deuils, celui qui avait divisé la force, a subi les conditions imposées par le maréchal Foch au nom de l'entente.
C'est la fin de la plus terrible et la plus sanglante des guerres par la victoire glorieuse de nos armes.
C'est la libération du sol français.
C'est le retour certain de l'Alsace et de la Lorraine à la grande famille française.
C'est une ère nouvelle de progrès social et de prospérité qui s'ouvre pour l'humanité délivrée de l'oppression germanique.
Ce matin, dès l'annonce de cet événement le plus important de l'histoire, Marseille, la grande et patriotique cité d'où s'est envolée il y a plus d'un siècle l'hymne national que chanteront aujourd'hui les peuples libérés, Marseille, après avoir acclamé nos troupes, a spontanément et magnifiquement pavoisé ses rues en fête, sous l'azur ensoleillé de notre ciel.
Qu'au souffle de la victoire, les couleurs françaises et alliées flottent sur toutes nos demeures !
Qu'elles manifestent avec éclat l'émotion et l'enthousiasme qui remplissent nos âmes.
Qu'elles s'inclinent pour saluer la mémoire de tous ceux qui sont tombés pour la Patrie.
Qu'elles rendent un hommage mérité au Gouvernement de la République et à son chef, au généralissime dont le clair génie a organisé le succès, à tous les hommes d'état, les Généraux français et alliés qui par leur confiance inébranlable dans l'avenir, par leur énergie et leur persévérance ont forcé le destin contraire !
Qu'elles expriment surtout notre immense gratitude, notre profonde admiration aux incomparables armées qui, au prix des plus lourds sacrifices et par un héroïsme sans défaillance pendant plus de quatre ans, ont assuré le triomphe du droit et de la liberté sans le monde !
Vive les alliés ! Vive la République !
Vive la plus grande France !
(salve d'applaudissements)
Déclaration de Monsieur Flaissières (conseiller municipal,maire de Marseille de 1892 à 1902 et de 1919 à 1931) :
Monsieur le Maire, Messieurs,
Je demande à Mr le Maire de bien vouloir m'autorise à lui présenter mes félicitations les plus sincères pour la noble initiative qu'il a prise de nous réunir ici ce soir en séance publique et de nous avoir ainsi permis de participer à la joie délirante dont il faisait tout à l'heure le saisissant tableau, de nous avoir ainsi permis également de nous associer de tout cœur aux hommages de tous ceux qui ont pris une part quelconque à la Victoire que nous célébrons aujourd'hui !
A ceux qui ne reviendront plus et dont le sacrifice devait contribuer à la victoire, à ceux qui, par un défi au sort, sont revenus glorieusement mutilés mais triomphants tout de même aujourd'hui, à ceux qui par un défi plus grand encore jusqu'à ce matin 11 heures et depuis quatre ans ont supporté toutes les misères innombrables et la vie de campagne militaire sans un seul mot de découragement, sans une seule hésitation à poursuivre le devoir sacré de la défense de la Patrie, aux morts, aux mutilés, à ceux qui heureusement sont encore plein de vigueur et de santé et qui demain reviendront au milieu de nous, auxquels nous pourrons dire directement le sentiment d'admiration que vous venez de leur adresser d'une façon si magistrale, à tous ceux là je rends hommage et pour ce qui me concerne, je vous remercie, Monsieur le Maire, d'avoir bien voulu nous réunir, je le fais en mon nom et en celui de tous mes collègues.
(applaudissements prolongés)